LE MUSÉE DES PROMESSES
Jardin d’Essai . Ouidah
« Le point de départ de toutes ces promesses est la nature »
C’est dans le Jardin d'Essai que sont nées les premières conversations avec Joël Andrianomearisoa autour de PROMESSE.
Ce jardin, véritable archive végétale, conserve des plantes aux récits millénaires et aux chapitres infinis. La terre de Ouidah raconte des histoires, sur une échelle de temps rare de plusieurs milliers d’années : celles des changements climatiques, celles des personnes qui y vécurent, ou bien encore celles des royaumes qui en furent maîtres. Chaque plante porte en elle un récit unique : les agrumes, ont longtemps porté en eux la promesse de la déportation et de la mort (les citronniers et les orangers sont plantés à partir du XVIIème siècle pour fournir aux équipages des navires négriers et aux déportés les apports de vitamine C destinés à enrayer le scorbut), au contraire les palmiers y racontaient la vie, l’architecture, l’alimentation, le tissage…, ou encore les plantes médicinales, qui incarnent d’autres récits de survie et de transformation.
La terre du Jardin d’Essai peut être lue pour comprendre ce qui nous a précédé et elle va donner vie, en son sein, à une œuvre hors norme :
Le Musée des Promesses
Cet édifice émerge de la terre de Ouidah comme un palimpseste. Cette oeuvre architecturale minimale très contemporaine, entre bâtiment et sculpture, vient apporter le témoignage du temps présent aux couches d’histoire que l’on peut lire en filigrane dans l’archive végétale qui y croit. L’oeuvre devient véritable musée, au protocole établi par Joël Andrianomearisoa, qui y invitera d’autres artistes au fur et à mesure des saisons.
Architecte, Joël Andrianomearisoa, l’a toujours été. Architecte des rêves et de l’émotion qu’il transmet dans chaque texte, chaque dessin, chaque miroir, chaque néon, chaque structure où la rigidité du cadre libère les formes et transcende la poésie. Il crée ici sa première architecture de béton.
« Le Musée des Promesses est pour moi un Manifeste architectural, c’est quelque chose que j’ai envie d’expérimenter aujourd’hui et que j’ai envie de répliquer ailleurs, sans doute à Madagascar ensuite. La question de l’architecture est importante pour moi.
La question d’un musée est importante aussi. Un musée représente l’éternité, faut-il garder les mémoires ou les oublier ? Est-ce que le plus important est de garder l’Histoire ? Je ne sais pas. Qu’est-ce qu’on fait des mémoires ? Qu’est-ce qu’on fait de l’Histoire aujourd’hui ? Est-ce qu’on se promet de les garder ? De s’en défaire ? C’est une vraie question d’actualité aujourd’hui au Bénin.
Finalement, tout est possible dans ce musée des promesses, c’est un musée de toutes les libertés, de toutes les possibilités en quelques sortes »
A l’orée des 20 ans de la Fondation Zinsou, le Musée des Promesses est une incarnation physique des conversations et des interrogations que nous partageons avec Joel Andrianomearisoa depuis toujours. Cette oeuvre nous questionne sur le rôle de l’institution muséale au XXIème siècle, sur le continent et ailleurs. Le Musée des Promesses est un espace ouvert à tous, tout le temps. Sa très grande ouverture sur le monde s’incarne dans son absence totale de porte et d’horaire de visite, abolissant toute barrière avec le public mais créant des contraintes nouvelles de conservation et de sécurité. Il défie tous les principes établis d’un musée et pourtant c’est comme tel qu’il se projette vers le monde. Il nous oblige à remettre en cause ce que nous avons appris. L’oeuvre, nous pousse alors à une réflexion sur ce que l’on donne à voir en fonction du contexte; une musée entièrement ouvert oblige à réfléchir l’oeuvre dans son environnement immédiat, prenant en compte le climat, la chaleur, l’humidité. Il s’oppose en cela au White Cube, aseptisé, au climat contrôlé, définit par le monde occidental comme un standard muséal. Il nous oblige à nous promettre d’inventer nos propres standards, en regardant ce qui nous entoure et en tenant compte de nos particularités. Il est autant question que réponse. Il est un monument aux rêves et à l’avenir. Il est la promesse de la fondation aux artistes, à son public, au monde…